vendredi 10 septembre 2010

Fever Ray, Zola Jesus @ l'Olympia - 09/09/10



Initialement prévu à La Cigale, le concert de Fever Ray s'est vu déplacé dans une salle plus grande. La faute à une demande bien plus importante que prévue du public parisien qui s'était déplacé en masse hier soir. Un concert court mais complet, spectacle son et lumière, grand messe, on était tous un peu secoués en remontant à la surface.

Pour les non-initiés au culte de Fever Ray, l'histoire est assez simple. Fever Ray est la moitié de The Knife, ce duo/fratrie electro que leur antépénultième album (cc @GuiOhm ) avait révélé au grand public grâce, notamment, à un titre repris par José Gonzalez lui-même utilisé dans une réclame pour poste de télévision à grand écran plat. Fever Ray c'est donc un side-project hanté, sorti en mars 2009, et acclamé tant par le public que par la critique. Imaginez donc les synthétiseurs et les samples cheap de The Knife sublimés par une myriade de percussion de bois,  d'instruments fragiles, le tout beaucoup plus sombre et inquiétant. Pour faire court, imaginez une bande originale au Black Hole de Charles Burns.



Le concert était fermement attendu donc, car la réputation de Karin Dreijer Andersson et de ses prestations scéniques la précède. On passe donc rapidement sur une première partie courte et un peu répétitive de Zola Jesus. La faute à une inexpérience certaine qui ne gâche en rien le potentiel de la jeune (19 ans) américaine aux fort relents Siouxsiens. (Ce qui nous sera confirmé après le  concert par la tenancière d'un bar en t-shirt Motörhead ayant décidé de passer le dernier album en date de Zola Jesus, Stridulum II ).

Après un court entracte, la salle est plongée dans un clair obscur glacé et noyée dans un nuage de fumée. Sur scène on distingue des dizaines de vieux abats-jour. Les premières notes de If I Had A Heart résonnent, des rais de lumières traversent la salle, les lampes s'allument en rythme, comme un battement de cœur, et la scène se met doucement à vivre. Elle arrive alors, gracieuse, dans son accoutrement de grande prêtresse from outer space, accompagnée de quatre musiciens grimés, sortes de tuxedo-troll envoutés, bizarres chamans brandissant des sceptres de gourou rapiécé.



Visuellement, le dispositif est impressionnant, la fumée noie la scène et confère une aura mystique à une musique qui, seule, est déjà chargée de mystère. Les jeux de lumières fascinent le public et l'on voit de nombreuses têtes levées, admirant les jeux de couleurs, un sourire béat en travers du visage.
J'ai l'impression d'être descendu sous terre, dans cette grande salle en bois, cachée du reste du monde, j'ai l'impression d'assister à une drôle de messe, à un opéra préhistorique, à la fois animiste, terrestre et irrémédiablement cosmique. Vous vous souvenez de cette cantatrice dans le 5ème Élément ? J'avais l'impression de vivre un de ces moments de grâce, un moment autre, face à une entité organique supérieure.



L'album entier est reproduit, avec en sus deux ou trois inédits. Le show est donc assez court mais l'absence de rappel ne semble pas gêner plus que ça les fidèles qui sortent doucement et en silence du lieu de culte. Depuis quand un alien, une divinité, se livre-t-elle à un rappel? Impressionnante, la faculté de ce groupe à s'imposer, sans un mot à son public, à instaurer une ambiance de communion sans s'adresser une seule fois à la foule, mais en étant pourtant très proche de cette dernière.
Fever Ray est le culte qu'il nous fallait, la religion tellurique et forestière que l'on attendait tous, le dogme magique de post-adolescents flippés que la musique rassure et rassérène.

jeudi 9 septembre 2010

1=0 - sec



C'est pas vraiment une nouveauté mais c'est un putain de coup de poing. On commence à avoir l'habitude pourtant, de tomber sur du rock français de qualité. Ça va pas être facile de pas cracher sur les groupes en carton qui sont censé être la relève du rock fr (coucou BB Brunes) tant l'autre versant du rock français, vif et acéré, rivalise d'inventivité et de hargne.


1=0 joue dans la cour des bons, la cour de feu-Diabologum, la cour des expérimentations de Michniak, la cour de la détresse galopante de Michel Cloup et d'Experience. J'avais envie de vous dire que les instru étaient le point fort de 1=0 tant la production est tranchée, tant les guitares te coupent comme une A4 entre l'index et le majeur, tant les mecs essaient d'inventer, de syncoper, de changer. L'émotion véhiculée par les compos rappellent parfois les plus fougueux morceaux du Kaolin des débuts ou le talent d'orfèvre d'Agora Fidelio. Je pourrais vous dire que les instru sont le point fort mais ce serait mentir. Le chant d' 1=0 innove et marque encore plus que la musique. Un chant qu'on peut rapprocher des spoken-words emballés de Diabologum, mais avec une scansion encore plus hachée et crue. Ouais, ça peut déstabiliser un peu au début mais il n'y a pas plus adapté que ce chant contraint, retenu, parfois maladroit. Détresse/urgence/violence, moi je signe et j'en redemande.

Vous trouverez de l'audio et des dates des concerts à venir ici : http://www.myspace.com/unegalzero




Produit

1 = 0 | MySpace Music Videos

mercredi 8 septembre 2010

Infinite Body - Carve Out the Face of My God



Pour son retour aux affaires, FoetusFoetus sort doucement de son coma en musique, avec l'excellent Carve Out the Face of My God, du non moins excellent Kyle Parker (Gator Surprise, entre autres). Parker oublie la harsh noise de ses débuts pour se lancer dans un piégeux album d'ambient-drone synthétique, risquant comme beaucoup avant lui de tomber dans les travers d'une musique lancinante, simpliste et répétitive. Et chiante. Il n'en est miraculeusement rien, malgré la simplicité, ou plutôt le naturel de ses compositions.  COtFoMG se construit comme une ascension, un élévation mystique par le biais de solides plages d'ambient grésillant et de pièces electronica/shoegaze un poil plus véhémentes, les mélodies primitives et cotonneuses s'éclipsant ici sous un amas solaire grésillant de bruit blanc et de sample indus distordus.

Vous n'y échapperez pas COtFoMG est organique. (I'm back baby) : Entendez par là que les samples industriels sont noyés, rattrapés par la masse sonore presque palpable des synthétiseurs.
 Parker ne superpose pas ses boucles, il évide, supprime, taille dans la masse comme dans une pierre brute. Un exercice qui demande application, répétition et parfois violence pour arriver à ses fins.  Infinite Body joue sur la discrétion de ses compositions presque heavenly, et ne se départi jamais d'une grâce et d'une beauté qui flirte avec l'esthétique et le raffinement dream-pop. On s'égare parfois dans de longues plaintes mystiques, souvent proches des mantras tibétains, comme un ressac léthargique nous invitant littéralement à plonger (Dive), à nous enfoncer dans les abîmes pour mieux nous élever.

Parker parvient à annuler toute temporalité, à mêler composition classique et déconstruction moderne et ainsi à effectuer un long et gracieux instantané du visage de Dieu.


Dive by Infinite Body from Brian Murnion on Vimeo.