vendredi 26 février 2010

The Sound Of Animals Fighting - The Ocean And The Sun

 


Déjà il y a cet artwork. Cette jaquette qui, fière de ses entremêlements branchus symétriques et de ses arabesques délicats, suinte le gloubiboulga Cult of Luna/ISIS/Callisto etc, à tous les coups. 
 Eh bien non. Raté.
Autre point important, visuellement, vous ne remarquez rien? Si si, ça sent l'humus, la mousse, le sous-bois,la glaise et la pluie... Bref, en un mot, ça sent l'organique tout ça. Avec en sus un tel titre d'album et un nom de groupe sauvage, il n'en fallait pas plus pour m'intriguer. Pour la petite histoire, TSoAF est un drôle d'animal, sorte de supergroupe mouvant et masqué regroupant (sur cet album tout du moins) des membres de Circa Survive et RX Bandits. D'ailleurs le moins que l'on puisse dire est que ce supergroupe est superambitieux. Alors à quoi ça ressemble, le bruit des animaux en train de se battre?  

TSoAF progresse dans une mixture psychédélique échevelée. Enracinés, notamment par leur premier album, dans un rock progressif qui sait montrer les crocs, le gang des 4 dilue sa hargne tout au long de l'album dans différentes humeurs : Avec une violence hardcore déboussolée, rappelant tour à tour Battle of Mice (les hurlements sur Another Leather Lung) ou the Fall of Troy (pour le riffing inspiré); avec précision et primitivisme, en utilisant des interludes instrumentaux noise (TP1) ou tribaux (Chinese New Year); avec inventivité et prise de risque (touches electro, polymorphie du chant) quitte à parfois s'égarer (le sympathique mais dispensable morceau éponyme). 
Tous maîtrisent parfaitement leur sujet, du chant varié aux guitares intelligemment utilisées, en acoustique autant que lors des phases plus nerveuses. La mention spéciale revient indéniablement au batteur, Chris Tsagakis a.k.a The Lynx, dont le jeu puissant, riche et syncopé est particulièrement mis en avant par le mix.

Le tout peut paraître un peu indigeste lors des premières écoutes. On a parfois la désagréable sensation que les mecs eux mêmes,  à trop vouloir surprendre leurs auditeurs, s'égarent quelque peu. De mêmes, il m'a fallu plusieurs écoutes avant d'apprécier pleinement les baisses d'intensité d'un album en dent de scie.
Ambitieux, The Ocean And The Sun l'est sans aucun doute, foisonnant de bonnes idées, parfois simplement génial. On regrettera juste qu'en lieu et place d'une véritable folie, The Ocean And The Sun ne nous livre qu'un éparpillement parfois surjoué.

jeudi 25 février 2010

Speak English or Die

Pas le temps pour des chroniques en ce moment, malgré un bon nombre de découvertes granuleuses détestablement addictives. En attendant, cols à jabot, pilzen kopf et basse aux épaules...







samedi 6 février 2010

Barn Owl - The Conjurer

 http://cdn.imposemagazine.com/__data/barn-owl-the-conjurer-lp.1.jpg

Il semble qu'Earth fasse des émules, quel que soit le style dans lequel le groupe de Dylan Carlson évolue. Vénérable ancêtre d'un drone monolithique et à l'origine de la déferlante Sunn O))), ils avaient su, avec Hex et The Bees Made Honey in the Lion's Skull, puiser dans l'americana fantomatique pour réinventer leur musique.
Il ne fait aucun doute que Barn Owl s'inspire, tout du moins s'inscrit dans la même veine désertique et crépusculaire. On retrouve ici de longues plages d'un drone-rock squelettique et inquiétant, avec cette même sensation qu'à l'écoute de la bande originale de Dead Man. Comme si, tout comme Neil Young à l'époque, le groupe avait réussi à saisir l'ensemble des nuances d'un spectre allant de la cérémonie chamanique Apache à la procession funéraire bancale, de la langueur hallucinée d'un mangeur de peyotl à la nonchalance d'un vieux charros. Plus sombre que les dernières sorties d'Earth, The Conjurer oublie parfois son jeu de guitare, pour s'égarer dans d'obscures contrées ambient, faites de larsens soutenus par des cordes, un piano ou des chœurs monotones évoquant les mantras de moines tibétains, conférant à cette country malade un ton oriental marqué. (On croit même distinguer du tanpura par instant).  Quatre longs titres comme une bande originale parfaite d'un triste western contemplatif...


jeudi 4 février 2010

Burzum - Belus




On pourrait, par mégarde, confondre ce Belus avec un album de black metal de bonne facture, d'un groupe lambda, avec un sens de la mélodie aiguisé, un goût prononcé pour la répétition inlassable de riffs efficaces et un penchant pour les étendues enneigées norvégiennes. On pourrait, par exemple, s'extasier devant le grain de ces guitares, devant la mélancolie simple mais poignante des morceaux, devant la fausse-chaleur qu'apporte la basse charnue.

 On pourrait se perdre dans l'unité de l'objet, qui s'étend avec fluidité, en un tout compact et effilé. On pourrait s'attarder avec plaisir sur les incursions galopantes presque pop de certains morceaux. On pourrait l'écouter quelques semaines, se surprendre à le ressortir, à y revenir, comme ça mine de rien. On pourrait alors se rendre compte qu'il ne s'agit pas ici d'un simple disque de black metal, mais du nouveau méfait d'un homme qui a apporté au genre ses lettres de noblesses.

Déçu par le nouveau Burzum? Déçu par la facilité du propos? Sûrement pas, car derrière l'apparente simplicité de Belus repose l'art primitif et viscéral, toute la genèse de cette musique. Belus est une cosmogonie, un récit des origines, dont la simplicité n'a d'égale que son amplitude.



mardi 2 février 2010

Eternal Tapestry - The Invisible Landscape

 


https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjEZdiAlFMJKWkNiJ7AevFdV1hGvKzphuPQaevrudULWpjxBl5MOrhK0aC6l4GG_kRC6OMlI7_H7INUOposkjLqoNX3CNvhG1dm-HBYc9z6L-SS1ISwEpEjzxNCiwLqUPVRXmEhXp2-2qGP/s400/110157.jpg
 
 
Je comprendrai peut-être pourquoi un jour (ou peut-être pas finalement), mais je me trouve irrésistiblement attiré vers une musique organique (le mot qui revient sûrement le plus souvent sur ce blog, avec hybride, hanté et mélancolique). Une musique organique donc, dans la forme comme dans le fond, qui véhiculerait je ne sais comment des sensations végétales, une odeur de mousse et de flore bourgeonnante. Il est évident que l'artwork y joue énormément, et que mon appréhension de la musique passe aussi, si ce n'est avant tout, par le visuel de l'album. Pensez au crépuscule automnal de Fever Ray ou à la luxuriance humide de Ginnungagap... Cette faculté qu'ont certaines musiques à produire devant mes yeux des paysages, une faune, une flore, parfois beaux et inquiétants, désolés, arides ou éxubérants, voilà que ce que je recherche dans la musique et voilà ce que les mecs d'Eternal Tapestry parviennent à susciter. Pourtant, rien de très suggestif ici, pas de nappes discrètes ni d'ambient éthéré mais un psych rock lourd et ample. Ici, il faudrait s'imaginer un buff bluesy et tribal au milieu d'une clairière... Il fait nuit et seul un brasier au centre du cercle éclaire les musiciens. 
 
 
 
http://oregonmusicnews.com/files/2009/12/EternalTapestry.jpg 
 
Chaque morceau suit le même schéma, se basant sur la répétition inlassable d'un couple basse/guitare sur lequel croissent des soli sinueux à rendre fou le plus sage des stoïciens. Le batteur s'acharne avec hargne et les cymbales résonnent jusqu'à l'acouphène.
Eternal Tapestry parvient à assimiler un héritage psyché, des Who à Grateful Dead tout en réclamant au stoner sa puissance et ses riffs bien gras. Quelle différence avec un groupe comme Om alors? On trouve effectivement des boucles de riffs, des développements flirtant avec l'improvisation  hypnothiques et hallucinogènes, mais Eternal Tapestry choisi l'option de la profusion, du foisonnement. Se mêlent alors aux envolées mystiques d'un Cisneros un capharnaüm proto-punk qu'on sent plus inspiré de Hawkwind que de l'ascétisme d'Om.
 
Ce LP est d'une sauvagerie pure et forestière (!?) qui risque de lacérer encore quelques temps ma trompe d'Eustache.